Des nouvelles de Limoilou

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De Québec à Vancouver sur le pouce en 1967

 

 

          Mon vieux chum Daniel et moi avons gradué en 1967 du Collège Universitaire Garneau.  Pour marquer cet événement important, nous avons décidé de nous rendre à Vancouver en auto-stop. Faire du pouce était notre moyen de voyager partout au Québec. Nous étions des habitués. 

 

Mais Québec-Vancouver, c’était une autre paire de manche. Tout un périple. Nous avions prévu cinq jours de route, au minimum. On a été chanceux car les automobilistes s’arrêtaient pour nous donner un lift, parfois court, parfois plus long sur la Transcanadienne. C’était l’année du centenaire de la Confédération canadienne et les gens étaient super gentils avec deux pouceux venant du Québec.

 

 

Notre premier lift sur la 20 fût dans la voiture d’un gars qui s’en allait à Toronto. Hourra ! Un beau début de voyage. Nous avons couché à Toronto au YMCA et le lendemain, la Transcanadienne et la traversée de l’Ontario nous attendait.

 

J’ai peu de souvenirs de la traversée de l’Ontario sauf de quelques villes dont Sault Sainte Marie et des épinettes à n’en plus finir. Ennui garanti !

 

À la frontière entre l’Ontario et le Manitoba, à Kénora exactement, alors qu’on avait le moral dans les talons parce que personne ne s’arrêtait, le miracle se produisit. Une Datsun modifiée, bariolée d’autocollants du Rallye Shell  s’arrêta. Ce rallye de renommée international entre Vancouver et Montréal était long de 4,000 miles.

 

- “Hé guys, I’m going to Calgary non-stop. If you want to join me…” Bien sûr qu’on a accepté. Mais un trajet sans arrêt?

 

- “We will stop for lunh and pee stop but I will drive all night” nous a prévenu le type qui devait être dans la trentaine. Un chic type qui nous raconta qu’il avait fait le fameux Rallye Shell jusqu’à Montréal et qu’il retournait chez lui.  

 

Nous avons vite compris que le gars n’allait pas conduire comme un chauffeur du dimanche. Nous avons passé une quinzaine d’heures en sa compagnie. Il parlait beaucoup et je crois qu’il s’était arrêté pour nous prendre pour avoir de la compagnie. Mais bon, un tel lift  ça se prend avec joie.  

 

Nous sommes arrivés à Calgary à l’heure du diner. Mais comme le trajet Calgary- Banff  était au plus deux heures de route, alors pas question de flâner au pays du Stampeed.  Hit the road again!

 

Nous avons encore une fois dormi au YMCA dans la pittoresque ville de Banff et nous avons profité de la soirée avec de jolies routardes qui venaient du Québec.

 

Le lendemain matin, on a repris la route. De courtes et de moyennes distances jusqu’aux portes de notre destination, Vancouver. Nous étions si près du but mais il était trois heures du matin et la nuit peu d’automobilistes s’arrêtent.

 

Une voiture de la GRC s’est immobilisée devant nous. Le policier nous avisa qu’il était interdit de faire du pouce à cet endroit. Quand il réalisa à notre accent que nous étions québécois, c’est en français qu’il nous offrit de nous reconduire au centre-ville. Il était québécois comme nous. Un gars du Saguenay. Une autre chance!

 

Après un dizaine de jours à Vancouver et à Victoria, j’ai pris le train pour Montréal. Trois jours trois nuits et sept heures sur un banc en voiture économie. Mon chum, lui, a décidé de prolonger son voyage vers le Yukon.

 

Comme l’a écrit mon ami Pierre Bujold dans sont texte Sur le pouce, parmi les gens qui acceptaient de nous faire monter dans leur voiture, il y avait…

 

« ll y avait ceux qui voulaient vous convertir. Ils voyaient dans le fait de faire monter un pouceux dans leur voiture l’occasion idéale de gagner une âme perdue à Jésus ou de faire de vous un adepte d’un gourou ou d’un illuminé comme il y en avait plusieurs à cette époque.

 

 

Il y avait les gars qui vous faisaient monter dans leur voiture pour se plaindre : de leur femme, de leur boss, de leur job, du gouvernement.

 

Il y avait des vantards qui cherchaient un auditoire à qui parler de leur succès et de leurs réussites

 

Et il y avait les silencieux. Ceux-là, c’étaient les plus mystérieux. Ils ne vous parlaient pas d’eux-mêmes et ne vous posaient aucune question sur votre vie et sur ce que vous pensiez de la vie, de l’amour et de la politique.

 

Mais la plupart du temps, les gars qui vous donnaient une ride étaient des gars ben ordinaires qui vous parlaient de leur travail et de leur famille, et qui vous posaient des questions sur votre vie et vos intérêts simplement parce que ça avait l’air de les intéresser. Ils voulaient juste avoir quelqu’un avec qui jaser…peut-être pour se garder réveillés et ne pas s’endormir au volant. »

 

 

          Belle époque.  On pouvait faire du pouce sans craindre de se faire attaquer. Les « pouceux et pouceuses » étaient en très grand nombre sur le bord des routes. On en voyait partout.

 

C’était au temps de l’insouciance, le temps où on avait confiance aux inconnus. Les choses ont bien changé…Qui fait encore du pouce aujourd’hui ? 

 

 

 

 

 

 



23/07/2021
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