J'étais de Saint-Fidèle, non de Limoilou
« Comparativement à aujourd’hui, les Limoulois disaient vivre dans St-Esprit, St-Fidèle, St-François-d’Assise, etc. plutôt que dans un quartier aussi vaste que le Limoilou actuel. (1)
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Mon enfance et ma jeunesse (années 50 et 60) je les ai passés à Saint Fidèle. Limoilou, c’était Saint Charles. On s'identifiait d'abord et avant tout à notre paroisse.
Même à partir du début de la Révolution tranquille, alors que la pratique religieuse diminuait beaucoup, la paroisse demeurait un lieu de rassemblement et d’identification pour ceux et celles qui l’habitaient. Il y avait les scouts et les guides de la paroisse, le centre des loisirs, les écoles et les nombreuses organisations paroissiales. « Un fort sentiment d’appartenance résultait de ce mode de vie clos et chacun s’identifiait à sa paroisse » mentionne Kathleen Pouliot dans son projet de Maîtrise.
Les emplois occupés par les paroissiens forgeaient leur caractère et leur identité ajoute Kathleen Pouliot : « Les habitants de St-Charles étaient des travailleurs de l’Anglo Pulp […] Ça faisait des gens différents, des gens entreprenants, vigoureux. » Tandis que les gens de St-François-d’Assise étaient « moins physiques que ceux de St-Charles. […] À St-François-d’Assise, il y avait plus de professionnels»
Des participants à la recherche de Madame Pouliot soulignent ceci : « St-Fidèle : c’étaient des snobs. St-François d’Assise : c’est moins snobs. Stadacona : pauvres. St-Charles : pauvres » (J-G.D.). Chacune des paroisses se trouvait marquée par ceux qui y habitaient. « Plus on montait dans le quartier plus c’était comme huppé. La partie St-Charles c’était la moins fortunée. Plus on montait dans le quartier, plus les gens étaient un peu plus aisés là. St-Fidèle, St-Esprit, St-François d’Assise c’était plus [fortuné]. »
On ne sortait pas souvent à l’extérieur des limites de Saint Fidèle. Aller à Saint François- d’Assise était une expédition et je ne parle pas de Stocane, Stadacona, où on ne mettait jamais les pieds de peur de rencontrer des durs à cuire : « André M. raconte s’être déjà promené une fois en bicyclette dans les années 1960 « pis il avait des gars qui venaient alentour de toi (André prend une voix grave) : qu'est-ce que tu fais icitte? Qu’est-ce que tu fais icitte? Le monde c’était assez fermé. Oh oui c’est une place fermée. » (A.M.). Selon les informateurs, les étrangers étaient perçus comme une menace pouvant « voler les filles de Stadacona ».
Il y avait aussi des gangs qui se livraient des batailles épiques : « On était la gang de St-Charles de Limoilou, la gang de St-Esprit, la gang de St-Fidèle. » (J-C.L.). Jean-Guy, Jean-Charles et les frères Cauchon rapportent que les guerres de clochers dans les années 1940 et 1950 pouvaient prendre racine autant dans le sport, où les équipes s’identifiaient à la paroisse, qu’au quotidien. »
Les choses ont bien changé. La paroisse, où ce qu’il en reste, n’est plus ce vecteur d’identité. Les Limoulois et les Limouloises sont de Limoilou tout simplement.
(1) Vivre son quartier : L’expérience du Vieux-Limoilou de 1960 à aujourd’hui
Mémoire - Kathleen Pouliot -Maîtrise en ethnologie et patrimoine
https://oatd.org/oatd/record?record=oai%5C%3Atheses.ulaval.ca%5C%3A2014%5C%2F31241
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