Des nouvelles de Limoilou

Toutes les villes et villages avaient leur simple d’esprit, leur innocent, leur « pas fin-fin » comme on disait.  

Grand-Mère en Mauricie par exemple avait son « pas fin » surnommé  la Snelle. Coiffé d’une casquette de police, armé d’une lampe de poche,  il  s'occupait de diriger la circulation lors de parades publiques telles que la parade de la St-Jean-Baptiste, le défilé du père Noël ou autres défilés publics dans les rues de la ville. Le plus souvent, il se promenait sur la sixième avenue et jetait un coup d'œil aux magasins comme s'il patrouillait à pied, comme un vrai policier.

Limoilou avait Kennett, le pas fin du quartier.  Kennett était camelot pour le journal L’Événement Journal, un quotidien du matin je pense, publié jusqu’en 1967.

Kennett était un grand gaillard, bien baraqué, à la coupe de cheveux qui semblait avoir été faite « avec un bol sur la tête » comme on disait.  Il parlait à tout le monde, il connaissait tout le monde.

L’hiver, Kennett offrait ses services comme pelleteur de galeries et il me semble l’avoir vu livrer des commandes d’épicerie en plus de sa route de journaux. Il faisait de petits boulots pour les gens de la paroisse.

Je n’ai jamais su où il habitait, on ne savait rien de lui (1). C’était le mystérieux « pas fin » du quartier.  On pouvait donc imaginer un tas de choses à son sujet. Certains disaient que c’était un doux alors que d’autres le décrivait comme un type qui faisait des colères terribles. 

Kennett était un personnage qui rendait bien des services et dont personne ne se moquait, du moins pas devant lui. Il faisait partie de la communauté et sa différence ne nous dérangeait pas.

(1) Un des amis m’a écrit : « Je pense que je l'ai connu.  Il habitait si je me souviens bien sur la 10e rue entre la 3^e et la 4e avenue.  Son prénom était Kenneth.  Les parents élevaient des poules sur le grand terrain devant leur maison qui était très reculée. »