Des nouvelles de Limoilou

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Notre petite patinoire dans la cour arrière

 

Décembre 1955

 

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Il était peut-être 6h du matin quand j’entendis couler le robinet de la cuisine.  C’était mon père qui remplissait des chaudières d’eau afin d’arroser la petite patinoire de notre cour arrière.

 

À tous les matins, très tôt, mon père arrosait notre patinoire.  Ma  mère lui criait : « Dépêche-toi, tu vas arriver en retard au travail. »

 

Dès que la glace était prise et bien lisse, j’enfilais mes patins, mon équipement de hockey et j’allais pratiquer mes “slap-shots” en attendant mes amis.   Vers 10h, nous étions une quinzaine de joueurs sur notre  petite surface glacée placée entre deux hangars de tôle. On divisait les équipes et le match commençait.

 

Mais  quand  d’autres joueurs se joignaient à nous, on allait alors sur la grande patinoire des Huot, située à trois maisons de chez nous.  C’est aussi là que se tenaient les matchs importants, les finales entre notre pâté de maison- notre bloc comme on l’appelait- et les blocs voisins.

 

Chez nous, on jouait même en soirée, dans une semi-obscurité car l’ampoule au plafond de la galerie n’éclairait que la moitié de notre cour. Cependant, trois soirs semaine, c’était réservé au patinage artistique de ma sœur qui enfilait ses patins blancs, ses patins de fantaisie, pour faire des arabesques sur la glace. C’était son “temps de glace” comme on dit au hockey, temps bien mérité par ailleurs.

 

Il y avait aussi la patinoire de la famille Dumais mais on n’y allait que sur invitation très spéciale car les Dumais avaient une « trollé » d’enfants ce qui ne nous laissait guère d’espace pour jouer.

 

En tout, autour de notre maison, il y avait cinq patinoires, entretenues pas cinq pères de famille qui trimaient dur pour avoir la plus belle glace aux alentours.

 

Un jour, papa revint de chez Nap Côté Sport (1) avec deux grosses boites de poudre, une bleue et une rouge.  “C’est nouveau me dit-il. C’est pour faire les lignes sur la patinoire.”  Et c’est ainsi que notre petite glace pris des allures de pro.  Wow, nous étions les seuls dans le voisinage à avoir de vraies lignes sur la glace, comme au Colisée de Québec ou au Forum de Montréal.

 

À cette époque, impossible d’acheter de vrais filets de hockey. On installait deux poubelles qui tenaient lieu de buts mais  ça engendrait d’interminables discussions sur la validité d’un but car la rondelle se retrouvait toujours dans la neige derrière le gardien.  On entendait alors des “Il n’est pas bon ce but là” et la chicane éclatait.

 

Papa, qui était très inventif,  décida alors de construire des buts en bois et il se servit du jute de poches de patates vides comme filet.  Ce fût l’invention du siècle qui rendit tous les autres pères jaloux.  Ce n’était pas très beau mais c’était efficace car le jute retenait la rondelle qui avait été “scorée”.

 

On jouait ainsi dehors de longues heures, même quand il faisait un froid glacial, après l’école et toute la journée les fins de semaine et les jours de congé scolaire.

 

Notre univers, pendant les mois d’hiver, c’était ces patinoires plantées dans les cours arrières des maisons du quartier.

 

(1) Magasin de sport très connu situé à Saint Roch.

 

 



25/04/2015
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